Harriet Brooks : une Marie Curie montréalaise!
Dans le cadre de l'événement Les Audacieuses - présenté par l'UQAM, qui se déroulera le dimanche 10 février au Centre des sciences, nous commençons aujourd’hui la publication de portraits de femmes inspirantes en sciences et technologies.
Il n’y a eu que trois prix Nobel de physique attribués à des femmes, dont un tout récemment à la Canadienne Donna Strickland. Mais une autre femme canadienne l’aurait mérité, il y a 100 ans. Découvrez Harriet Brooks, dont les travaux en radioactivité ont eu une importance comparable à ceux de Marie Curie!
Collaboratrice de trois prix Nobel
Harriet Brooks est née en Ontario mais fait ses études à Montréal. Elle est une pionnière, car elle est la première femme à obtenir un diplôme de maitrise en physique au Canada, en 1901.
Par la suite, elle travaille avec Ernest Rutherford, physicien et chimiste d’origine néo-zélandaise et qui a travaillé plusieurs années à l’Université McGill, à Montréal. Considéré comme le père de la physique nucléaire, il obtiendra en 1908 le prix Nobel de chimie grâce, entre autres, à la découverte d’un phénomène qui a été observé par Harriet Brooks : la désintégration des atomes qui accompagne la radioactivité.
Puis, en 1902, elle quitte Montréal pour collaborer avec un autre futur prix Nobel, le physicien J.J. Thompson, au laboratoire de Cavendish en Angleterre. Il recevra le Nobel en 1906 pour sa découverte de l’électron.
Finalement, en 1906 elle traverse la Manche et s’installe à Paris où elle travaille à l'Institut du Radium aux côtés de Marie Curie, qui avait déjà reçu le Nobel de physique en 1903 (elle allait en recevoir un deuxième en 1911!).
Harriet Brooks est très probablement la seule scientifique de l’histoire à avoir travaillé avec trois lauréats du Nobel!
Trois importantes découvertes
Si elle a travaillé avec autant de grands noms, c’est qu’elle avait un talent énorme en recherche. On lui doit trois importantes découvertes :
• Elle a découvert un gaz radioactif, le radon (Rn), qui est le plus lourd des gaz nobles. C’est un gaz qu’on retrouve partout, car il est émis naturellement par la croûte terrestre.
• Une deuxième découverte essentielle : Mme Brooks a observé la transmission de la radioactivité, c’est-à-dire qu’une substance qui n’est pas naturellement radioactive peut le devenir.
• La troisième contribution de Harriet Brooks est d’avoir décrit comment l’uranium et le thorium se décomposent en d’autres éléments chimiques.
Au total, ses recherches ont accéléré le progrès de la fission nucléaire, la détection des radiations dangereuses liées au radon dans les maisons, et ont même contribué à déterminer avec plus de précision l’âge de notre planète!
Une reconnaissance tardive
Mais sa carrière de recherche a été trop courte! En 1907, à l’âge de 31 ans, elle se marie à Frank Pitcher et doit mettre fin à ses travaux en raison des conventions de l’époque.
Harriet Brooks s’est éteinte en 1933 à l'âge de 56 ans, possiblement d'une leucémie à cause de ses travaux avec des substances radioactives. À son décès, Ernest Rutherford a souligné l’importance des contributions de Harriet Brooks en la comparant à Marie Curie. Après sa mort, son nom a été oublié pendant très longtemps... jusqu’à ce qu’une biographie sur elle voie finalement le jour en 1992.
Récemment, la jeune actrice Ellen Denny, arrière-petite-nièce d’Harriet Brooks, a écrit une pièce de théâtre intitulée Wonder et pour laquelle elle a lancé une campagne de financement. Ce projet, qui met en valeur la vie et les contributions d’Harriet Brooks, vise à « rendre hommage aux innombrables femmes dans les sciences qui sont passées sous silence et motiver celles qui continuent de lutter pour l’égalité des sexes » a dit Mme Denny. Il est grand temps que tous connaissent Harriet Brooks!
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